Last update: 12 janvier 2016
Introduction
Les mesures de l’efficacité clinique reflètent généralement les résultats qui sont importants pour les patients, tels que les symptômes, la morbidité ou la mortalité.
Il arrive que des résultats, tels qu’une crise cardiaque, une croissance maligne (cancer) ou la mort, puissent être identifiés et mesurés à l’aide d’une définition clinique par un individu autre que le patient. Néanmoins, il est de plus en plus évident que les traitements ne devraient pas justifier uniquement d’une efficacité clinique et économique, mais qu’ils devraient également être tolérés et bénéfiques pour les patients Les mesures d’efficacité clinique ne peuvent pas nous révéler comment un patient se sent ou fonctionne, ni les résultats qu’il souhaite obtenir d’un traitement. La mesure de cet élément d’acceptabilité requiert une preuve basée sur le patient qui inclut des mesures du bien-être.
Pour cela, l’accent a été mis sur le développement de résultats rapportés par les patients (PRO) qui sont basés sur la perception par le patient d’une maladie et de son traitement (adaptation de la définition de l’Agence européenne des médicaments (EMA)). Les mesures des résultats rapportés par les patients (PROM) sont les outils utilisés pour mesurer et collecter des données sur les PRO.
Pourquoi les résultats rapportés par les patients sont-ils importants ?
Les résultats rapportés par les patients sont importants parce que, concernant une maladie/un traitement, ils fournissent un point de vue du patient qui ne serait peut-être pas détecté par une mesure clinique mais qui peut être aussi important qu’une mesure clinique pour le patient (et son adhésion au traitement). Par exemple, imaginez un scénario dans lequel diagnosticlui a été diagnostiqué une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Une consultation rapide d’études cliniques concernant des traitements de BPCO révèle les résultats suivants :
Le tiotropium a réduit le nombre de participants présentant une ou plusieurs exacerbations en comparaison des résultats obtenus avec des [agonistes bêta d’action prolongée] (taux de probabilité (TP) 0,86 ; intervalle de confiance (IC) de 95 % 0,79 à 0,93)… Aucune différence statistiquement notoire n’a été remarquée au niveau du volume expiratoire maximal seconde (VEMS) ou du score des symptômes entre les patients traités au tiotropium et ceux sous ABAP.
Que révèlent ces résultats sur les sentiments du patient concernant le nouveau traitement ? Qu’en est-il de la manière dont ils pouvaient réaliser leurs activités quotidiennes ? Une meilleure compréhension de la signification de ces résultats pour le patient est nécessaire. Par exemple :
- Une exacerbation conduit-elle à une hospitalisation ? Ou bien s’agit-il d’une quinte de toux qui peut être gérée à domicile ?
- Le test de laboratoire VEMS (volume expiratoire maximum/seconde) peut-il affecter directement le mode de fonctionnement des patients ?
- Le score des symptômes détecte-t-il le ressenti du patient ou s’agit-il d’une mesure « objective » des symptômes ?
Contrairement aux résultats cliniques standards, les PRO nous apportent un point de vue unique sur la manière dont un traitement peut affecter un patient. Des individus présentant une maladie, un diagnostic ou un état de santé identique peuvent avoir une perception différente de cela aussi bien physique que mentale. En effet, leur capacité à assumer un handicap ainsi que d’autres facteurs peuvent altérer leur perception concernant leur satisfaction à l’égard de la vie. Les mesures de PRO sont importantes car elles peuvent conduire à une science médicale qui est plus centrée sur les avantages réels que les patients peuvent obtenir.
La capacité de mesure du bien-être en tant que résultat devient spécialement importante dans les situations cliniques pour lesquelles l’objectif principal du traitement est le bien-être du patient plutôt que de prolonger la vie ou de réduire les manifestations de la maladie. Par exemple, des patients souffrant d’une maladie chronique qui n’engage pas immédiatement le pronostic vital peuvent s’inquiéter davantage de leur état psychique et de leur capacité à vivre pleinement. Un patient atteint d’une maladie en phase terminale pourra s’inquiéter davantage de son niveau de confort, de sa capacité à vivre plus longtemps et de l’impact de sa maladie sur ses proches.
Quels résultats sont importants ? Comment sont-ils mesurés ?
Les PRO doivent être soigneusement définis afin de capturer des informations qui sont importantes pour les patients. Ces informations doivent également être mesurées avec précision et, autant que possible, d’une manière qui permette de les comparer à d’autres mesures. Un développement médiocre de concepts entraînera la mesure de résultats qui ne sont pas importants pour les patients (bien que mesurés avec précision), alors que des méthodes de mesure médiocres identifieront un résultat qui est important pour les patients, mais qui est difficile à interpréter.
Cela signifie que la manière dont une question est formulée est très importante. Des questions vagues pourront fournir des informations vagues qui ne sont pas utiles. Par exemple, on peut poser la question suivante à un patient : « Comment vous sentez-vous sur une échelle de 1 à 10 ? » (1 mal, 10 extrêmement bien). C’est très imprécis. Des questions plus spécifiques relatives au bien-être psychiques en se basant sur la mobilité, la respiration, etc., fourniront des informations plus détaillées et plus précises. Il est donc essentiel de décider avec précision ce qui doit être mesuré ainsi que la précision de la formulation de la question.
Dans les PRO, un « concept » est l’objet de mesure, tel que les exemples suivants :
- un symptôme ou un groupe de symptômes
- les effets sur une fonction ou un groupe de fonctions spécifique, ou
- un groupe de symptômes ou de fonctions présentés pour mesurer la gravité d’un état de santé.
Une fois que le « concept » est décidé, des questions s’y rapportant sont posées aux patients. Ces questions sont appelées des « éléments ». Ces éléments sont soumis afin de comprendre le changement dans le concept.
Par exemple, des investigateurs cherchant la réponse à un traitement de patients atteints de BPCO pourront identifier que ces patients peuvent avoir le sentiment qu’ils ont plus de mal à réaliser des tâches le matin. Le concept qu’ils décident de mesurer correspond à la charge et la durée de symptômes matinaux, ainsi qu’à la capacité des patients à réaliser des activités à cette période de la journée. Les éléments permettant de capturer ce concept peuvent être des questions telles que les suivantes :
- Vous êtes-vous lavé ce matin, autre que votre visage, c’est-à-dire toilette corporelle, douche, bain ?
- Vous êtes-vous habillé ce matin ?
- Vous êtes-vous déplacé dans votre logement tôt ce matin après avoir pris vos médicaments ?
Les questions optionnelles à ces questions proposées aux patients peuvent inclure diverses réponses, telles que les suivantes :
- Oui, je l’ai fait par moi-même
- Oui, mais j’ai eu besoin d’aide
- Non, je n’ai pas pu
- Non, je ne l’ai pas fait, pour d’autres raisons
Il peut également être proposé aux patients de répondre à une question de suivi, telle que « Dans quelle mesure avez-vous eu du mal à effectuer cette tâche ? »
Dans certains cas, les soignants ou les médecins ont développé le concept associé à une maladie et à un groupe de patients. Néanmoins, le besoin pour les patients eux-mêmes pour contribuer à identifier et à développer des concepts est de plus en plus reconnu.
Principaux concepts mesurés dans les PRO
- Qualité de vie liée à la santé (QVLS) La QVLS est multidimensionnelle. Elle représente l’évaluation par le patient d’un état de santé, et de son traitement, sur sa vie quotidienne, dont les éléments suivants : fonction physique, fonction psychologique, fonction sociale, fonction du rôle, fonction émotionnelle, bien-être, vitalité, état de santé, etc.
- Satisfaction des patients Évaluation des traitements, préférences des patients, professionnels et systèmes d’administration de soins de santé, programmes d’éducation des patients et dispositifs médicaux.
- Fonctionnement physique Les limitations physiques et les restrictions d’activité, dont les suivantes : soins auto-administrés, marche, mobilité, sommeil, sexualité, handicap.
- État psychologique Effet positif ou négatif et fonctionnement cognitif, dont les éléments suivants : colère, vivacité d’esprit, estime de soi, sentiment de bien-être, détresse, adaptation.
- Signes et symptômes Des rapports de symptômes physiques et psychologiques ou de sensations non directement observables, dont les suivants : énergie et fatigue, nausée, irritabilité.
- Fonctionnement social Limitations au travail et à l’école, participation en communauté.
- Adhésion au traitement Rapports ou observations concernant l’utilisation réelle de traitements.
- Utilité L’utilité est la capacité (perçue) d’un élément à satisfaire des besoins ou des souhaits. En économie de la santé, les utilités mesurent l’intensité des préférences des patients. Par exemple, l’importance de divers facteurs pour les patients, tels que les symptômes, la douleur et la santé psychologique. L’impact de nouveaux traitements sur ces facteurs, et par conséquent sur la qualité de vie (QdV), peut alors être calculé. C’est une approche courante utilisée par les entités d’évaluation des technologies de la santé (ETS) qui conseillent si des traitements devraient, ou non, être financés (par exemple) par des services de santé gouvernementaux.1
Comment mesurer et interpréter ?
La méthodologie de mesure est très importante dans la recherche PRO. Une fois que le concept et les éléments sont identifiés et définis, des décisions soigneusement réfléchies doivent également être prises concernant les points suivants :
- mode de soumission des questions aux patients,
- moment de la soumission des questions aux patients,
- mode d’enregistrement des réponses, et
- mode d’interprétation des données.
Généralement, les PRO sont mesurés avec des questionnaires ou des études qui sont, au choix :
- complétés par les patients eux-mêmes,
- complétés par le patient en présence du chercheur, ou
- complétés par le chercheur au cours d’un entretien en personne ou par téléphone.
Les différentes approches de la collecte des informations présentent des avantages et des inconvénients. Par exemple, si l’utilisation de meneurs d’entretien réduit les erreurs et garantit que les enquêtes soient menées à leur terme, les ressources d’essai/de traitement peuvent ne pas autoriser cette option.
Il est essentiel que les approches et les méthodes utilisées répondent aux perceptions des patients et aux concepts concrets qui sont utilisés au lieu de se centrer sur le meneur d’entretien et la manière dont les questions sont posées. Dans l’exemple de COPD fourni dans la section ci-dessus, les symptômes matinaux peuvent être définis avec plus de fiabilité si le questionnaire est soumis le matin que s’il est complété plus tard dans la journée.
Les chercheurs qui développent ces outils/instruments doivent tout entreprendre pour s’assurer qu’ils mesurent des concepts importants pour les patients d’une manière reproductible et compréhensible. Le tableau 1 ci-dessous fournit un aperçu d’aspects importants devant être pris en considération dans les PROM.
Propriété | Description |
---|---|
Fiabilité | Les mesures sont reproductibles et cohérentes et doivent établir la différence entre des changements au niveau des réponses et des changements dus à des erreurs d’administration |
Validité | |
Validité apparente | Mesure ce pour quoi il est conçu |
Validité des critères | Mesure des aspects qui sont véritablement importants pour les patients |
Validité du contenu | La mesure dans laquelle un instrument couvre toutes les dimensions clés pertinentes |
Validité de construction | Les mesures reflètent ce qui se passe en réalité |
Réactivité | Changement dans les mesures en réponse à un changement de QVLS |
Commodité | Les mesures sont faciles à obtenir, et l’instrument est simple à administrer. |
Possibilité d’interprétation | L’importance des mesures est comprise par les cliniciens ou les chercheurs davantage que par les patients et autres |
Résultats signalés par les patients, évaluation des technologies de la santé et implication des patients
De nombreux organismes d’évaluation des technologies de la santé s’appuient sur la synthèse des résultats pour émettre des recommandations concernant l’accès à de nouveaux traitements. ETS s’appuie largement sur la recherche quantitative des données cliniques et l’expérience du patient, comme fourni par les PROM.
Il est clair qu’une partie importante de l’implication du patient dans l’utilisation des PRO devrait intervenir au cours des étapes du développement clinique. Néanmoins, une fois qu’une soumission est déjà faite pour une autorisation de mise sur le marché, cela peut s’avérer trop compliqué pour ce type d’implication.
De nombreux PROM n’ont pas été développés avec la participation massive de patients.2
Cela signifie que les PROM ne mesurent pas nécessairement des concepts importants pour les patients. Il existe différentes choses que les groupes de patients peuvent faire pour gérer cet écart, avant, pendant et après le développement du PROM :
- Évaluation et révision des PROM – Les patients et les groupes de patients peuvent apprendre à évaluer la qualité des PROM. Ils peuvent utiliser les informations qu’ils récupèrent pour informer des groupes de patients similaires de ce qui est important et de ce qui ne l’est pas. Cela peut être particulièrement important pour les patients acceptant de prendre part à des essais cliniques.
- Identification du besoin de PROM – Certaines initiatives sont attrayantes avec des patients qui identifient le besoin de PROM. Cela est tout particulièrement important pour les entreprises qui doivent identifier des mesures très tôt dans le développement des médicaments. La FDA a également pris les rênes dans ce domaine (pour plus d’informations, voir http://www.patientnetwork.fda.gov/)
- Développement et évaluation de cadres conceptuels et/ou théoriques – La validation de ces outils nécessite une recherche qualitative avec les patients. Bien que les patients aient été consultés dans le passé, il y a un besoin identifié de collaboration avec les patients et de leur accorder une influence accrue dans le développement des PROM.
- Fourniture de concepts via la conscience des PRO – Lorsque les patients décrivent des expériences concernant ce qu’il en est de souffrir d’une maladie, ils identifient indirectement des concepts de santé qui revêtent une grande importance pour eux. Les organismes d’ETS essaient souvent de trouver des PROM qui détectent ces concepts. Une certaine conscience des PRO qui existent déjà peut aider les patients à mieux décrire des expériences et des concepts pour des organismes d’ETS afin de garantir la détection des PRO.
- Approbation des PROM – Les groupes de patients qui ont examiné des PROM peuvent également envisager de les approuver et de les intégrer à l’ETS comme données traitées par les patients.
- Besoins de mise en avant – Les patients pourront également vouloir signaler les PROM qui n’avaient pas été validés avec l’implication des patients ou les concepts nécessitant le développement d’un PRO.
- Révision de sorties ETS – De nombreuses décisions ETS prennent en considération des preuves économiques qui sont basées sur les mesures d’une qualité de vie liée à la santé (QVLS). Les mesures de la QVLS doivent être pertinentes pour les patients. En effet, ces mesures peuvent faire la différence entre des décisions de listes positives et négatives.
Ressources complémentaires
- Food and Drug Association (2009). Guidance for industry. Mesure des résultats rapportés par les patients: Utilisé pour le development de medicament et pour certifier l’étiquetage . Récupéré le 6 janvier 2016 sur http://www.fda.gov/ucm/groups/fdagov-public/@fdagov-drugs-gen/documents/document/ucm193282.pdf
Références
- PROQOLID (2015). ‘Free access level: Concept of interest’. Retrieved 6 January, 2016, from http://www.proqolid.org/about_proqolid
- Staniszewska, S., Haywood, K.L., Brett, J., Tutton, L. (2012). ‘Patient and public involvement in patient-reported outcome measures: Evolution not revolution’. The Patient, 5(2), 79-87.
A2-6.06-v1.1